Chaque année, pendant l’hiver, la taille de la vigne est un travail très important puisqu’il prépare la récolte suivante. La vigne est une liane : à l’état naturel sauvage elle produit des rameaux très longs qui portent des minuscules grappes de baies acidulées.
Les hommes pour la cultiver l’ont ramenée vers sa souche en coupant les longues tiges, ils ont donné ainsi plus de vigueur aux jeunes repousses et aux grappes qu’elles portent. La vigne est donc un bonzaï ! Voilà pourquoi les vielles souches, tant de fois mutilées, ont cet aspect si torturé.
Tailler est un travail manuel long et méticuleux. Il faut savoir repérer les sarments à éliminer, les futurs départs utiles, la forme générale en évitant l’orientation contraire au mistral capable de tout briser. A chaque pied de vigne le tailleur doit se poser les bonnes questions et adapter ses gestes.
L’outil ancien était la cisaille tenue à deux mains qui demandait de gros efforts surtout lorsqu‘il fallait éliminer une « banne » (un bras déjà ancien et donc d’un bon diamètre). Aujourd’hui le sécateur électrique facilite le travail car il n’y a plus à peser sur la mâchoire qui se déclenche d’une simple pression du doigt.
Le paysage du vignoble, à cette période, est très contrasté. Les vignes non encore taillées se dressent en désordre lançant leurs bras nus et maigres ; la parcelle est alors comme une manifestation d’hystériques échevelées. A côté, les vignes qui ont été taillées s’alignent dans un garde-à-vous tout militaire.
Quand mon mari Jean-Claude avait appris à tailler avec son oncle Théophile – notre Raimu familial – il reçut les bonnes leçons que la tradition fait vivre. L’oncle insistait particulièrement pour une incision très franche contre la souche pour éliminer d’anciens départs, cette coupe, difficile à réaliser avec la cisaille, assurait que le rameau ne repousserait pas.
Je me souviens de la moue très expressive de l’oncle professeur, venant contrôler le travail, et découvrant des coupes laissant un ergot visible. L’oncle avait eu alors cette expression qui est restée une leçon : « Mais dis donc, Jean-Claude, tu en as tant que ça de casquettes à accrocher dans les vignes !!! ».
Marie-Françoise.